L’étude intégrée d’une butte-témoin de carbonates lacustres (Butte Iouton) a permis d’établir un modèle de dépôt détaillé d’une marge carbonatée oolithique de lac salin, de mettre en évidence des cycles de transgression-régression et d’apporter des éléments de reconstitution paléogéographique des bassins lacustres priaboniens du sud-est de la France. Un modèle de rampe carbonatée lacustre a été mis en évidence, présentant du pôle proximal au pôle distal : (1) un domaine interne à laminites microbiennes et wackestones à ostracodes et mollusques, (2) un domaine plus ouvert, d’énergie modérée à sédimentation granulaire péloïdale et (3) un environnement externe de plus haute énergie à accumulation d’ooïdes et de péloïdes. La sédimentation carbonatée de bordure de lac se produit principalement pendant des phases de transgression lacustre contrôlées par la subsidence alors que les surfaces d’émersion marquent des périodes de bilan hydrique déficitaire et d’assèchement du lac (régression forcée). Les signatures isotopiques (carbone et oxygène) des carbonates ainsi que les tendances d’évolution verticale de la salinité estimées par les assemblages de mollusques suggèrent que les transgressions lacustres ne sont pas associées à un bilan hydrologique excédentaire, mais à des connexions avec des masses d’eau salées adjacentes dans un contexte subsident. Les sédiments carbonatés de la Butte Iouton se sont déposés sur les marges d’un système de lacs salins interconnectés de grande dimension, occupant différents sous-bassins du Languedoc et de la Vallée du Rhône. La marge sud de ce système lacustre était à sédimentation silicoclastique dominante, alimentée par l’érosion des reliefs pyrénéens, alors que la marge nord était carbonatée avec un développement significatif de corps oolithiques.